vendredi 27 mai 2016

Lettre à un jeune poète, Virginia Woolf


" Aucun de nous n'est complet en lui seul."
                                               Virginia Woolf .





 Virginia Woolf avec le poète  Robert Briges - Juin 1926 
(Photo de Lady Otteline Morrel)



 



 "Il lui arrivait parfois de ne plus savoir qu'elle était un être à part doté d'un avenir qui lui appartenait en propre."....


 « On n'a pas toujours envie de penser au futur quand on vit, comme il arrive parfois, dans le présent ». 
Et pourtant elle a lui a répondu. 
Elle a trouvé cette force. 
Elle a tenu à répondre à ce jeune homme. Et quelle réponse ! Quelle hymne quelle déclaration d'amour adressée par Virginia Woolf ! 
Elle savait la poésie des cimes, elle savait l'immortalité des poètes. Elle les savait présents. A ses côtés. 
En chaque poète. 
Car c'est une charge, une responsabilité aussi que l'on devine à travers cette lettre. 
Écrire écrire justement au nom de tous, à travers soi. 
Alors y a t il des mots, des temps interdits de poésie ? Des espaces des sujets réservés ?
Non, liberté , imagination, rythme, rythme, danse du rythme, où tout se lie, se relie, où tout devient ensemble. 
La cohérente beauté du monde. Qui se ressent, une chair donnée à l'esprit, pour lui donner corps, corps et âme, une bienfaisance belle et généreuse, pleine d'élégance, de tendresse, et d'humour. 
Aucun mot n'est interdit, aucun sujet, aucun temps, seul compte l'honnêteté de l'écoute, la disponibilité totale que doit avoir le poète par rapport à sa vision. 
Ne pas faire de la musique mais être musicien pour reprendre les propos de Sainte Colombe.
Virginia Woolf le sait, la poésie n'est pas morte, elle est là et elle nous le dit, et qu'importe l'époque, qu'importe la nuit, qu'importe ce qu'ils disent, ce qu'ils écrivent, qu'ils pleurent, qu'ils suivent des corbillards vides, ils n'ont décidément rien compris. Qu'ils comptent , qu'ils se mirent, qu'ils courent l'affiche, qu'ils se courbent, se tortillent mais qu'ils cessent d'écrire des rimes sans raison.
Dans chaque vers écrit demain, il y a toutes les lettres des poètes. Une promesse d'avenir. Une urgence, un instinct.
Aucun voyelle, aucune syllabe, aucune couleur, aucun souffle, aucune image, aucun silence n'appartient au passé. Tout est là, vivant, présent. En tout. Mais pour que cela soit, pour que cela soit entendu, il faut ce rythme, ce battement,cette pulsion d'écrire, ce désir scopique., que le poids du poème pèse dans la paume de l'homme. «  Je sens dans mes doigts le poids de chaque mot ». Dans chaque livre écrit se tient déjà le livre qui viendra. Un concerto en cime majeure, à l'inverse de l'abîme. C'est ainsi que dans un puits on peut faire tenir le ciel. 
Une lettre de musique, sublime.
 
à noter : Magnifique préface de Viviane Forrester. Magnifique traduction de Jacqueline Délia. aux Editions Arléa- 1996 
ISBN 9782869592742. 

 
« À présent monte en moi le rythme familier ; les mots qui étaient dormants tantôt se soulèvent, tantôt agitent leurs crêtes, et tombent et remontent, et tombent et remontent encore », « comme si nous étions les éléments séparés d'un seul corps et d'une seule âme » ( Les eaux profondes de Virginia Woolf, extraits)

 

Lecture,  Astrid Shriqui Garain


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