mardi 28 juin 2016

Grisélidis réal, mémoires de l'inachevé







Grisélidis Réal, écrivain, peintre, prostituée . 1929. 2005. 

« Mon cher Maurice,

Erika m'a téléphoné hier et m'a dit qu'elle t'avait vu, elle était très 

contente. Quant à moi j'ai été reprise et engloutie par les 

tourbillons où je dois me débattre chaque nuit. Je mets tout mon 

espoir, ma volonté en ce 1er juillet prochain où je serai délivrée. 

Vois tu Maurice, tu n'as peut être pas compris vraiment ce que 

c'est pour moi, tout ça.

Loin d'être une partie de plaisir, c'est bien plutôt une torture, 

la démolition de l'âme et du corps. »

Grisélidiss Réal, mémoires de l'inachevé, extrait.


Sommes nous prédisposés à vivre ce nous vivons ? 

Pour quelle raison a t elle connu l'enfer, 

pour quelle raison  a- t- elle fait naître une galaxie entière ?







D'où le vient cette fulgurance, cette beauté primale, cette force, 

cet instinct ?

Besoin d'amour, urgence de liberté.

« Chaque matin, à l'aube, quand je vais au lit, épuisée, il me 

semble qu'un troupeau de pourceaux m'a passé dessus, qu'ils m'ont 

piétinée, meurtrie, bavé dessus, craché sur mon visage, dans mes 

yeux, mes oreilles, ma bouche. C'est une sensation d'humiliation 

et d'horreur, qui me pousserait au-delà de la nausée jusqu'au 

meurtre. Oui je pourrais facilement, très facilement tuer si je me 

laissais aller. »


Elle est de celles qui sont blessées de longtemps. 

De celles qui tranforment les larmes en étoiles. 

De celles qui sont heureuses comme des folles d'exister.


De celles qui respirent de voir l'enfant jouer devant la fenêtre. 

Qui sourient à tous les soleils futurs.

De celles qui écrivent 

Des lettres comme pour faire des trous dans les murs. 

Pour respirer, pour crier, hurler, bercer, consoler, maudire, 

voir et parler, nous regarder et puis nous sourire.

Des adresses d'amitié d'amour et de tendresse. 

Putain et prisonnière et peintre et poète,  et écrivain. 

Maitresse amante, et pleine mère guerrière.


Quelques unes des oeuvres de Grisélidis Réal : 






La prison. La drogue. La faim. La peur. La traque. La trique. 

La fuite…

Et quand on lit cette correspondance ...quelle joie, quel bonheur !


Quel espoir toujours réactivé. 

Quelle confiance en la vie, 

quel regard sur l'humanité. 

Quelle innocence préservée.

Quelle combativité. 

Ordre Moral, curé, armée, poulailler.  Ils vont déguster.  

Elle va leur jetter leur deux mille ans de contre vérité. 


Elle reçoit des coups mais elle sait en donner.

Comment a t elle fait cela ? 

sauver ce qui en nous est le plus précieux ?

comment a t elle fait pour qu'ils ne

massacrent pas son innocence ? 

Lucide oui. Tourmentée blessée à jamais. 

Naïve jamais.

Mais tellement jeune dans ses élans. 

Oui flamboyance. 

Eclat, couleurs, vibrations, mouvement. 

La vie plein la gueule, à pleine dents, à coups de crocs, 

des momes plein les bras.

Mais lire, peindre ecrire, aimer toujours, prendre soin.

Dire l'injustice,  l'étroitesse des corps, la  cruauté de nos vies, 

mais sauvegarder la Beauté de la Vie, dire cette urgence. 


J'ai pris le parti de lire cette correspondance avant 

tout autre lecture de Grisélidis Real.

Je crois que  sa vie contient son œuvre. 

Lettres, dessins, peintures, enfants, lettres, amitié, passions,
 musique, révoltes,  tout est un chemin. 

Un chemin, une route, qui mène où bon il semblera à chacune et

 chacun de la retrouver .

« Les palais aux velours obscurs », « mort en sursis » et « Lili » 

sont des textes étonnants.

Grésilidis, la tzigane, la gitane, la libre, la flamboyante.


« Oui moi

Moi l'enfant

Vous m'avez donc volé ma peau

Lié mes mains

Scellé mon sexe

Vous m'avez dérobé l'amant de mes huit ans et l'amante de mes 

quatorze ans

Vous m'avez rendue frigide suicidaire paranoïaque


et Putain

Je vous vomis papa mama caca gaga

Le foute aux tombes

La Merde au coeur

La Mort au cul

et l'âme aux chiens.

Qu'on m'exorcise moi je veux tous les corps contre le mien

Bites bouches couilles cul tripes con vagin langues doigts

Mimosa violettes algues prunelles grenades

Orange amère mon père ma mère ma sœur mon frère

Qu'on m'ouvre enfin le ventre

Qu'on y foute l'univers

Tant que nous n'aurons pas éjaculé nos morts

La vie n'est pas possible. »


Grisélidis Real....

c'est une flamme, un brasier, une étoile hurlante, 

vibrante, battante.

On a rarement lu chose pareille dans le ciel 

 Et c'est un véritable bonheur que de vivre des instants de lecture 

comme celui là.




Lecture,  Astrid Shriqui Garain 


 https://www.youtube.com/watch?v=EclDtIZexmY







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